Etude FFF/ISM 2021 – Les entreprises en magasin et non-sédentaires, leur marché et leurs salariés
L’étude menée par l’Institut Supérieur des Métiers à la demande de la Fédération des Fromagers des France dresse un portrait complet, « à 360° », de la profession de crémier-fromager, des entreprises et de leur marché. A travers ce métier, fortement symbolique de la gastronomie française, elle illustre parfaitement le renouveau de l’artisanat et du commerce alimentaire de proximité observé depuis les années 2010.
Les travaux ont en effet permis de dénombrer un tissu d’établissements en progression (3600, dont 20% de professionnels exerçant sur marchés et éventaires), animé par 13.500 salariés et non-salariés, et affichant une activité en hausse, y compris durant l’année 2020 (le chiffre d’affaires du secteur approche désormais le milliard d’euros). Si le tissu est bien représenté en Ile-de-France, la densité des crémiers-fromagers est plus forte dans les régions de fabrication traditionnelle : Auvergne-Rhône-Alpes, Franche-Comté, Normandie… Un rééquilibrage semble cependant en cours : ces cinq dernières années, les créations d’entreprise ont été plus fortes dans les régions de la côte atlantique (hormis la Bretagne), encore moins pourvues.
Comment expliquer ces bons indicateurs ? Comme pour les autres métiers de bouche, l’activité de crémier-fromager bénéficie de tendances de consommation favorables. Le produit fromager est un produit plaisir, santé, porteur des identités de terroirs. Produit festif par excellence, il est consommé de plus en plus en dehors du repas traditionnel et s’adapte également à la consommation nomade. Enfin, le retour progressif des consommateurs vers les circuits de proximité, qui signe la fin du règne sans partage de la grande distribution et de la consommation de masse, profite également à ce commerce alimentaire spécialisé, ancré dans la proximité.
La profession s’est développée ces dix dernières années en tirant profit de ce retournement de tendance et en se positionnant sur un marché de niche, celui du fromage à la coupe (dont elle détient 55% du marché), avec une offre « premium » très qualitative. Ce renouveau s’accompagne néanmoins de nombreuses évolutions :
- Evolution des profils de dirigeants : plus de la moitié d’entre eux ont opéré une reconversion professionnelle en créant leur activité et sont diplômés de l’enseignement supérieur.
- Evolution des modalités d’exercice : le métier de crémier-fromager s’exerce désormais majoritairement en boutique (dans 80% des cas), alors que les professionnels sur halles et marchés étaient encore majoritaires jusqu’en 2010.
- Diversification des modèles économiques : le modèle traditionnel du crémier-fromager réalisant plus de 80% du chiffre d’affaires en produits fromagers et laitiers, n’est plus le modèle unique, même s’il est encore majoritaire en nombre. D’autres positionnements-marchés et modes d’organisation coexistent :
- de nombreux crémiers-fromagers exercent aujourd’hui dans des grands magasins de produits frais, aux côtés d’autres professionnels des métiers de bouche ;
- 5% des établissements répertoriés sont des boutiques tenues par des fabricant de fromages ;
- d’autres ont positionné leur activité sur la vente de produits du terroir et élargit la gamme de produits à des salaisons/charcuteries ou d’ autres produits locaux ;
- globalement, 10% des établissements répertoriés proposent un mixte de produits gastronomiques : ils sont à la fois crémier-fromager et caviste, ou crémier-fromager et primeur, ou crémier-fromager et épicier (épicerie fine). Outre le fromage, ces magasins valorisent donc la gastronomie française dans son ensemble.
- De la dégustation à la restauration : certains crémiers-fromagers franchissent le pas en proposant une offre de restauration (bar à fromage, plats cuisinés à base de fromage).
Les professionnels ont relativement bien traversé l’année 2020, la crise sanitaire ayant relancé la consommation de fromage. L’étude met néanmoins en avant quelques enjeux dont la profession peut se saisir pour les années à venir :
- Un ralentissement dans la croissance semblait perceptible avant la crise sanitaire : la création d’entreprises a marqué le pas en 2019 et 2020 ; le volume des ventes avait de même stagné en 2018 et 2019, le développement du chiffre d’affaires étant dû principalement à la hausse du prix moyen du KG de fromage. Il est possible que le positionnement sur une offre premium à forte valeur ajoutée puisse détourner une partie de la clientèle du circuit du commerce spécialisé.
- La diversification de la clientèle est en effet un enjeu très fort pour le métier : si un rajeunissement est perceptible, la moitié des clients ont plus de 50 ans.
- La promotion de nouveaux modes de consommation du fromage (apéritif, buffet, snack, cuisine…) paraît à privilégier pour atteindre cet objectif. L’année 2020 et la crise sanitaire ont notamment montré l’appétence des consommateurs pour l’usage du fromage en cuisine.
- Les pratiques numériques, dynamisées par la crise sanitaire, sont encore à développer : ainsi, la moitié des professionnels ne disposent pas de site internet.
- Une réflexion peut être menée sur la professionnalisation et la fidélisation des salariés du secteur, très jeunes.
- Enfin, la formation en alternance est à déployer, au-delà de la région Ile-de-France où elle est déjà bien présente.
Commander l’ouvrage sur le site de la Fédération des Fromagers de France :